Nature morte

L'expression nature morte sert à désigner un sujet constitué d'objets inanimés ou d'animaux morts, puis, par métonymie, une œuvre représentant une nature morte.



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Nature morte - Peinture par thème

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Définitions :

  • Definition : Une image d'objets inanimés. Leurs sujets peuvent être des navires, de la nourriture, des fleurs, des ouvrages, des animaux morts ou... (source : cybermuse.beaux-arts)
  • Composition représentant des objets inanimés, voir des animaux morts. (source : raa)
  • arrangement composé de fleurs, de fruits ou d'autres aliments ou objets, généralement représentés en intérieur.... (source : virtualmuseum)

L'expression nature morte sert à désigner un sujet constitué d'objets inanimés (fruits, fleurs, vases, etc. ) ou d'animaux morts, puis, par métonymie, une œuvre (en peinture ou en photographie, etc. ) représentant une nature morte. Le terme n'apparaît qu'à la fin du XVIIe siècle. Jusque-là, seul cose naturali (choses naturelles) avait été utilisé par Vasari pour désigner les motifs peints de Giovanni da Udine. Par la suite en Flandre vers 1650, apparaît le terme stilleven pour des «pièces de fruits, fleurs, poissons» ou «pièces de repas servis», ensuite adopté par les Allemands (Stilleben) et par les Anglais (still-life) qui se traduirait par «vie silencieuse ou vie immobile». En Espagne, l'expression pour parler des natures mortes est bodegones. L'expression «nature morte» apparaît au XVIIIe siècle. Diderot, dans ses Salons, parle de «natures inanimées».

Charles Sterling, spécialiste de la nature morte[1], propose quant à lui la définition suivante de la nature morte :

«Une authentique nature morte naît le jour où un peintre prend la décision principale de choisir comme sujet et d'organiser en une entité plastique un groupe d'objets. Qu'en fonction du temps et du milieu où il travaille, il les charge de toutes sortes d'allusions spirituelles, ne change rien à son profond dessein d'artiste : celui de nous imposer son émotion poétique devant la beauté qu'il a entrevue dans ces objets et leur assemblage.»

— Charles Sterling, 1952


Histoire et types de natures mortes

Antiquité

Les premières natures mortes datent de la période hellénistique (IIIe et IIe siècles av. J. -C. ) mais il ne nous en reste que des descriptions : aucune peinture n'ayant survécu jusqu'à nous. Selon Pline l'Ancien, le plus célèbre des natures-mortistes de cette période était Piraïkos (IVe et IIIe siècles av. J. -C. ). Il peignait des boutiques de barbiers et de cordonniers, des ânes et en particulier des victuailles – probablement en tableaux de chevalets. On parle alors de rhopographie (représentation de menus objets) et de rhyparographie (représentation d'objets vils) qui ont des connotations péjoratives. Pourtant, le peintre, toujours selon Pline, connaît un véritable succès et ses peintures, perçues comme mineures, se vendent mieux et plus cher que celles de ses contemporains plus en vue.

Malgré cette vision critique de la part de ses contemporains, la nature morte de l'Antiquité possède déjà une autre ambition que celle du seul plaisir mimétique, «Il est clair que les natures mortes hellénistiques et romaines qui représentaient des mets prêts à être consommés comportaient une allusion épicurienne. » comme le précise Charles Sterling (Charles sterling, La Nature Morte, de l'Antiquité au XXe siècle, nouvelle édition révisée, Paris, Macula, 1985, p. II). On trouve ainsi assez souvent des mosaïques de natures mortes mais aussi des vanités dans les atriums d'été romains, où les convives invités aux repas retrouvaient ainsi rappelé le «carpe diem» horacien !

Moyen Âge

Avec l'hégémonie catholique, la représentation d'objets comme seul sujet d'une œuvre disparaît au Moyen-Âge. À cette époque, «l'esprit réaliste s'effaça au profit d'un langage emblématique compris de toute la chrétienté. Les objets, en se soumettant au sujet d'une composition, concourent au développement du thème religieux; ils ont une importance essentielle dans la signification de certaines scènes bibliques; ils les situent, ils les datent, ils caractérisent les personnages. » (Michel et Fabrice Faré, «Vie silencieuse de la nature morte» dans La nature morte de Jan Bruegel de Velours (1568-1625) à Chaïm Soutine (1893-1943), catalogue d'exposition, Bordeaux, éd. Galerie des Beaux-Arts. 1978. p7. ). Ces objets ne sont par conséquent plus là pour leur existence propre, mais pour ce qu'ils symbolisent, et c'est une des principales raisons qui font que les spécialistes s'accordent fréquemment à considérer qu'il n'y a pas de natures mortes durant cette période de l'histoire. Il faut attendre les théologies de saint François d'Assise, et de saint Thomas d'Aquin, le retour de la philosophie aristotélicienne mais aussi les théories de Roger Bacon et Guillaume d'Occam pour voir le catholicisme se réconcilier avec les sensations et l'expérience de la nature, et pour que réapparaisse un certain intérêt pour l'objet comme tel au travers des œuvres de Giotto (fresque en trompe l'œil de 1305 représentant un lustre en fer forgé à la chapelle des Scrovegni à Padoue) et de Duccio di Buoninsegna (vers 1255-1260-vers 1318-1319). Il faudra cependant attendre toujours deux siècles pour voir s'imposer la représentation d'objets comme sujet d'une peinture.

XVIIe siècle

Dans le monde moderne, la nature morte naquit au XVIe siècle, mais se développa en particulier à partir du XVIIe siècle, dans les écoles du nord (Flandres et Hollande), toujours particulièrement enclines à représenter un réel cru. Elle se propagea ensuite en Europe, et en France spécifiquement.

Au XVIIe siècle. En Espagne, les natures mortes, se présentent principalement sous la forme de vanités à la morale catholique, alors que l'Europe du nord, protestante, renie les sujets religieux et se consacre à la peinture bourgeoise au travers des paysages et , eux aussi, de la nature morte. La nature morte devient alors un outil au service des deux principales puissances religieuses du moment. Pourtant, derrière ces messages pieux prodigués par les natures mortes, se cache un véritable intérêt mimétique. Les objets représentés conservent certes leur symbolique religieuse, héritée des textes chrétiens, mais au contraire de la période médiévale, l'aspect esthétique de la peinture prend une importance essentielle, et la nature morte est l'occasion de prouver l'habileté de l'artiste et de répondre à la demande du public bourgeois qui aime à voir représenter les objets de la vie courante ou du luxe en peinture.

XVIIIe siècle

Jean-Baptiste Siméon Chardin, c. 1750, Kunsthalle, Karlsruhe

Il suffit de lire les textes de Diderot consacrés à Chardin pour s'apercevoir que le plaisir mimétique pur, inavoué au XVIIe siècle dans les vanités, s'affirme pleinement au XVIIIe siècle et pour se rendre compte que la représentation d'objets dans la peinture occidentale est constamment partagée entre le plaisir de la mimesis et celui de la symbolique. Cette dualité de la nature morte est illustrée dès l'Antiquité et par son premier classement de genres qui place la nature morte tout en bas de l'échelle, tout en considérant Zeuxis comme un peintre de génie pour être parvenu à peindre des grains de raisin qui trompent jusqu'aux oiseaux.

Sans vouloir entrer plus avant dans ce grand débat de l'art autour de la mimétique, il nous fallait cependant souligner que la nature morte semble au centre même de ce dernier, autant durant l'Antiquité que durant la Modernité.

XIXe siècle

«Les artistes du XIXe siècle, à part Delacroix, n'inventent guère de nouveaux arrangements. Manet même héritera de ces formules non sans les pénétrer, il est vrai, de son génie.»
«D'autres occupations s'adressent aux gens heureux du siècle. Ils sont nombreux à se convaincre du progrès des idées et des mœurs. Renonçant aux œuvres de mort, à la guerre comme à la chasse, ils s'appliquent à la vie de l'esprit. Les peintres de nature morte feront valoir à leurs yeux l'art et la science, en mêlant habilement les attributs. Ainsi, la valeur symbolique de l'objet, par-delà les siècles, ne se perd pas complètement. Elle se perpétue, se modifie selon les époques. Elle apparaît comme une constante de la peinture française de nature morte. Les trophées des arts et des sciences retiennent le souvenir des lointaines allégories et des anciens emblèmes du Moyen Âge. Leur sens évolue uniquement. Le désordre des cabinets d'amateurs, des tables encombrées de livres et de papiers, représentés en peinture, n'évoque plus la mélancolie des vaines recherches. Les objets symbolisent désormais la fièvre de connaître !»

— ibidem, p. 18.

Mais si cette citation résume une partie de la représentation de la nature morte du XIXe siècle, elle n'indique pas toute l'ampleur de l'évolution que connaît ce genre à cette période.

C'est principalement parce que la nature morte était perçue comme un genre mineur trop mimétique durant les précédents siècles qu'elle n'a pas été investie des significations et des aspirations complexes associées à d'autres genres estimés, tels que la peinture d'histoire ou le portrait, et qu'elle put ainsi devenir un véritable instrument avant-gardiste de recherches formelles au XXe siècle. Cette transition de la nature morte comme genre mineur à celle d'outil plastique quasi-inévitable du XXe siècle se fait par le biais de Cézanne qui le premier, et avant les cubistes, expérimente au travers de la nature morte de nouveaux dispositifs perspectivistes/représentatifs.

XXe siècle

Ce qui définit les avants-gardes du XXe siècle est principalement le choix des sujets : de simples ustensiles domestiques, des fruits (non exotiques), et de façon plus générale, des objets simples de la vie courante. Les messages extra-picturaux de la peinture des Anciens sont supprimés, et la bougie se transforme en lampes à gaz, etc.

Étrangement, la nature morte traverse tout l'art du XXe siècle, tandis que ce genre est perçu par la majorité des gens comme étranger à l'art contemporain. Le genre a évolué, et la représentation des objets n'est plus étroitement liée à une symbolique chrétienne comme elle le fut au XVIIe siècle, mais la signification de la nature morte a évolué avec celle de l'objet. Il n'est par conséquent pas étonnant de retrouver les natures mortes autant chez les surréalistes, que dans le pop-art où il symbolise à lui seul une «société de consommation».

Quoi qu'il en soit, la nature morte est actuellement partagée entre son lourd passé et son omniprésence au sein même de l'art contemporain. Si on voulait ouvrir le débat, il serait par conséquent tentant de réfléchir sur le ready-made comme nature morte contemporaine. Car si cette forme artistique ne répond pas à la définition de Charles Sterling citée en introduction, elle n'en reste pas moins la mise en valeur d'un objet anodin par le biais de l'art, et certains commissaires d'exposition n'hésitent pas à associer le ready-made à la nature morte, comme le démontre l'exposition Objects of Desire : The Modern Still Life organisée par The museum of Modern Art de New York en 1997. La question de la nature morte reste par conséquent actuellement, ouverte.

Conclusion

Au Moyen Âge, la nature morte telle qu'on la connaissait disparaît à cause de l'hégémonie catholique. On peint la chrétienté. On peint des objets symboliques. Au seizième et dix-septième siècles, la nature morte prend tout son essor en Flandre et en Hollande; au nord on se consacre à la peinture bourgeoise et au sud aux œuvres religieuses. Au dix-huitième siècle, la représentation d'objets occidentaux passe du symbolisme à l'esthétisme et vice-versa.

En 1650, aux Pays-Bas, apparaît le terme stilleben, pour les Anglais still-life, en Espagne bodegones et en France vie silencieuse.

Au dix-neuvième siècle, Delacroix saura se différencier des autres peintres de nature morte. Ces peintres feront valoir à leurs yeux l‘art et la science. La valeur symbolique de l'objet se perpétuera selon les époques et deviendra une constante mathématique de la peinture française. Un outil sur lequel on peut se baser pour mesurer le degré d'évolution de la société, de la culture, de la religion... Au dix-neuvième, puis au vingtième siècle, on peint des choses de la vie courante au contraire de la période néo-classique (grosso modo la période 1700 à 1850) où on peint des objets de l'Antiquité romaine et grecque.

Au dix-neuvième siècle, 1839, la photographie remplace progressivement la peinture. L'appareil photographique est accessible. Nous n'avons pas besoin du talent du peintre pour reproduire l'objet, l'appareil photos le fait pour l'homme.

Écoles

École flamande

XVIIe siècle

Au XVIIe siècle, la nature morte flamande se définit par

L'atelier de Rubens emploie de nombreux peintres de natures mortes, dont le style calque plus ou moins celui du maître.

Ses principaux représentants sont :

XVIIIe siècle

L'art de la nature morte flamande se perpétue au XVIIIe siècle, et essaime dans toute l'Europe.

École hollandaise

XVIIe siècle

On oppose fréquemment école flamande et hollandaise. En effet, dans les Pays-Bas du Nord, le dispositif politico-économique fait que les mécènes sont fréquemment des bourgeois - fortunés ou non - et non pas de riches aristocrates. La nature morte, thème bourgeois par excellence, prend par conséquent une grande importance, et se définit par

Les peintres hollandais produisent quelquefois des tableaux de manière quasi-mécanique. Chacun a sa spécialité : les fleurs, les livres, les repas interrompus... On note un fort développement de la vanité, qui se définit par la présence d'un crâne et/ou d'une horloge, références au temps qui passe ainsi qu'à la vanité des possessions. Sous l'influence de Rembrandt, figure majeure de l'école hollandaise, des nouveautés stylistiques se mettent en place : clair-obscur intense, touche qui se libère, augmentant le mystère et la dimension lyrique de l'œuvre.

Les grands représentants de la nature morte hollandaise sont :

École française

XVIIe siècle

Notes et références

  1. Entre autres, Charles Sterling fut un grand spécialiste des Primitifs français.

A. M. Charbonneaux, Les Vanités Dans l'Art contemporain, Paris, éd. Flammarion, 2005.

Anonyme, La nature morte de Bruegel à Soutine, catalogue d'exposition, Bordeaux, éd. Galerie des Beaux ­Arts, 1978.

COMTE H., Natures mortes de l'Antiquité à nos jours - La vie silencieuse, Paris, Casterman, 1992.

FARÉ, Michel, La Nature morte en France. Son histoire et son évolution du XVIIe au XXe siècle, Genève, Pierre Cailler, 1962.

ROWELL, Margit, Objects of Desire : The Modern Still Life, catalogue d'exposition, The Museum of Modern Art, New York, Distributed by Harry N. ABRAMS, inc., 1997.

SCHAPIRO, Meyer, Les Pommes de Cézanne, Essai sur la signification de la nature morte. Style, Artiste et Société, traduction par Blaise Allan, Daniel Arasse, Guy Durand, Louis Évrard, Vincent de la Soudière, et Jean-Claude Lebensztejn. Paris, éd. Gallimard, 1982.

STERLING, Charles, La nature morte de l'Antiquité au XXe siècle, nouvelle édition révisée, Paris, Macula, 1985.

Voir aussi

Thèmes artistiques

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